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Juifs Grecs…

Les Juifs ... et les Grecs !!! 

 

Le 4 novembre. M. Theodorakis, âgé de 78 ans, prenait la parole à une conférence de presse où il présentait son autobiographie intitulée « Où trouver mon âme » Dans ses propos, il se livra à une comparaison entre les Juifs et les Grecs et, emporté par son élan, il déclara :

« Nous et les Juifs sommes deux peuples pas comme les autres. Mais eux. ils sont fanatiques, et ils parviennent à s'imposer... Aujourd'hui. nous pouvons dire que ce petit peuple est à la racine du mal. Cela veut dire que la grande connaissance de soi et la persévérance ont de mauvais résultats. »

  

Ces différents commentaires me semblent avoir sous-estimé un aspect important de l’incident. Et je voudrais ici proposer une explication qui devrait donner à réfléchir à tous croyants.

Affirmer que les deux sont « pas comme les autres » n’est pas critiquable. On connaît le rayonnement historique de la civilisation grecque, dont les lycées et universités du monde entier étudient les textes.  On connaît l’apport inégalé du peuple juif dont la Loi, résumée par le décalogue, inspire la plupart des légistes du monde entier et se retrouve dans la Déclaration Universelle des doits de l’homme. Effectivement, les deux peuples peuvent légitimement se prévaloir d’une influence décisive dans l’Histoire du monde.

  

Une dialectique juifs - grecs dans la Nouvelle Alliance ?

Quand on perd le contrôle de ce qu’on dit, à ce niveau de notoriété, c’est que quelque chose a provoqué cet écart. On peut y déceler une arrière-pensée issue de la culture chrétienne. En effet le rapprochement « juifs-grecs » est inscrit dans les évangiles et lettres de Paul, en toutes lettres ! Les passages en question sont suffisamment importants pour que chaque auditeur même un peu distrait des offices religieux chrétiens ne peut pas ne pas avoir entendu la formule en question. Nous en donnerons ici quatre exemples tirés de la lettre de l’Apôtre Paul aux Romains, qui est souvent considérée comme l’exposé fondamental de la doctrine chrétienne :

« Car je n’ai pas honte de l’Evangile: il est puissance de D.ieu pour le salut de quiconque croit, du Juif d’abord, puis du Grec. » (Romains 1:16) 

« Détresse et angoisse pour tout homme qui commet le mal, pour le Juif  d’abord et pour le Grec; gloire, honneur et paix à quiconque fait le bien, au Juif d’abord puis au Grec, »(Romains 2: 9-10) 

« Mais quoi? Avons-nous encore, nous Juifs, quelque supériorité? Absolument pas! Car nous l’avons déjà établi: tous, Juifs  comme Grecs, sont sous l’empire du péché. » (Romains 3:9) 

« Ainsi, il n’y a pas de différence entre Juif et Grec: tous ont le même Seigneur, riche envers tous ceux qui l’invoquent. » (Romains 10:12) 

 

Voilà comment, depuis que le Nouveau Testament a été écrit, les chrétiens entendent parler « des Juifs et des Grecs » ! C’est ainsi que le trublion grec a inévitablement enregistré mentalement qu’il pouvait y avoir quelque part une certaine dialectique Juifs-Grecs. Et ce d’autant plus que, comme grec, il avait la chance de lire, ou d’entendre, le texte dans sa version originale, et dans sa langue maternelle, aux différences près entre ce texte ancien et le langage moderne.

Reconnaissons que les non-grecs ont eu entre les mains les mêmes textes dans leur propre langue, mais qu’ils sont moins sensibles à cette dialectique n’y étant pas nommément inclus.

J’ai répertorié dix-neuf passages du Nouveau Testament dans lesquels la dialectique Juifs-Grecs est évoquée ! Bien plus, on croit entendre dans certains de ces passages que l’auteur néo-testamentaire suggère, par cette formule, qu’il englobe l’humanité toute entière: cela apparaît dans les deux versets du chapitre 2 cités plus haut et dans le verset suivant de l’épître aux Galates :

Galates 3:28  Il n’y a plus ni Juif, ni Grec; il n’y a plus ni esclave, ni homme libre; il n’y a plus l’homme et la femme; car tous, vous n’êtes qu’un en Yeshoua HaMashiah.

Un peu d’histoire

Pour comprendre cette particularité de nos Ecritures saintes, il est donc bien nécessaire d’y regarder de plus près, et notamment remonter un peu dans l’histoire mouvementée de la Judée et de ses habitants. Lors du retour de captivité, après l’édit de Cyrus le Grand, roi de Perse, les israélites s’organisent, reconstruisent le temple de Jérusalem ainsi que les murailles de la ville. Mais la région est dominée par la compétition entre la Grèce, la Perse et l’Egypte, ces trois puissances se succédant dans la domination du pays, souvent avec une férocité implacable. C’est ainsi que les horreurs perpétrées par Antiochos IV suscitent la révolte victorieuse des Macchabées. Les luttes pour le pouvoir se développent notamment autour d’une rivalité entre pharisiens et hellénistes. La puissance de Rome s’accroît alors et devient prépondérante, tant sur la Grèce, minée sur le plan militaire par des conflits internes que sur l’Egypte, la Syrie et la Judée. On parle désormais de l’empire romain. Une royauté est établie sur la Judée, c’est la dynastie des Hérodiens, qui sont dans une situation de vassaux à l’égard de l’empereur, comme dans beaucoup de contrées dont Rome s’est assuré la domination grâce à ses célèbres légions. On trouve donc une situation ambigüe pour les israélites : occupés par les romains dont ils rêvent de secouer le joug, gouvernés par des potentats vassaux de l’empereur, ils se souviennent des années terribles passées sous la férule  des occupants syriens qui avaient profané le temple et décrété le culte à leur Dieu grec. De plus, si la Grèce est vaincue militairement, elle a fait alliance sur le plan politique avec Rome et, de ce fait, continue à rayonner sur le plan des arts et des lettres, ce qui répand dans tout le bassin méditerranéen un vent de libéralisme des mœurs et de la pensée qui est perçu comme un danger mortel chez ceux qui conservent les convictions traditionnelles issues de la Thora. Le souvenir des guerres de libération menées par les Macchabées un siècle auparavant est encore vif …

Quand le Nouveau Testament parle des Grecs, ce n’est pas des gens de nationalité grecque qu’il s’agit, mais de tout autre chose : ce sera de cette mouvance philosophique à laquelle s’attachaient certains juifs épris de libéralisme, d’idées nouvelles, d’affranchissement des idées vieillottes, nous dirions maintenant des tabous. Opposer Juifs et Grecs revient à souligner la nécessité d’un choix entre tradition et assimilation à la culture ambiante. Pour les tenants de la tendance dure, par exemple les pharisiens dont était Paul, le combat prioritaire était bien sur les idées, car l’assimilation à la culture gréco-romaine conduisait évidemment à l’abandon de la Thora : les « grecs » étaient ainsi le type même des « goyim ».  

Juifs et goyim

Il faut expliquer ici quelle est la signification du mot goy (pluriel : goyim). Strictement parlant, on désigne par là tous ceux qui ne sont pas israélites, ou juifs.. L’usage d’une telle expression peut paraître orgueilleuse, comme si elle voulait dire que les Juifs étaient supérieurs aux autres… L’antisémite de service aura vite échafaudé son raisonnement sur le sujet ! Mais, à mon avis, il n’en est rien et pour deux raisons au moins. La première est que l’on retrouve dans toutes les civilisations et tous les peuples cette façon de se situer: notre façon à nous serait par exemple de parler des « étrangers » ; rien a priori ne trahit un orgueil ou une pensée d’ostracisme ; c’est un simple constat. La seconde est qu’une telle distinction leur a été imposée, selon les textes bibliques, par Dieu Lui-même qui, lors de la « signature » officielle de l’Alliance au Sinaï avait déclaré « Vous serez ma propriété personnelle parmi tous les autres peuples. ». L’Alliance conclue par l’Eternel avait en effet été acceptée par le peuple Hébreu sortant de l’esclavage égyptien. Ce peuple résultait de la prolifération de la descendance de Jacob, descendant direct d’Abraham. Ainsi, pour ceux qui reconnaissent au récit biblique une importance fondamentale, ce peuple est devenu le peuple « élu », c’est-à-dire choisi par D.ieu pour être le porteur de la Révélation divine pour tous les autres peuples. Telle était bien la mission qui lui a été confiée, comme nous le verrons plus loin. 

 

Emmanuel Rodriguez

Commentaire(s) sur “Juifs Grecs…
  1. Constantin a ecrit:

    Bonjour,
    Je suis Grec et Chrétien moi même et votre article m’a interpellé.
    Tous d’abord je pense qu’il est interessant de remonter un peu plus en arrière pour comprendre la rencontre entre l’esprit grec et l’esprit juif.

    C’est l’historien juif Flavius Joseph qui le raconte le meiux : Quand Alexandre le Grand, à la tête de ses redoutables phalanges macédonniennes est arrivé devant Jérusalem, le grand sacrificateur est sortit de la ville Sainte pour aller aux devant de lui. Alors se serait passé cette scène inouïe : le jeune roi est déscendu de son cheval Bucéphale et se serait agenouillé devant le prêtre. A ses compagnons d’armes stupéfaits il racontera que le prêtre lui etait apparu en rêve la veille.Les Juifs, en admirations, decretère que les premier nés se nommeraient Alexandre qui est devenu depuis un prénom juif.

    C’est là la version « romancée » vue par les Juifs. Voici la nôtre. Elle réside dans le tout premier roman de la culture européenne : l’Iliade.

    Trpi est assiégée par les Grecs. Les deux armées se battent et ça se passe mal pour les Troyens.
    Hector rentre dans la ville pour demander aux femmes de sacrifier à Athéna dans l’espoir d’infléchir la déesse qui soutiens le camp Grec.

    Homère raconte alors ceci : Hector rencontre sa femme et son fils qui etait sur la muraille pour voir les combats. Et il raconte avec une empathie poigante la supplique de sa femme pour qu’il ne retourne pas à une mort certaine, ne laisse pas son fils orphelin. Hector avoue savoir l’issue fatale et son déchirement entre sa famille et le devoir envers la cité, qui l’emporte. Et Homère termine par la peur que l’armure éteincelante provoque sur le fils d’Hector quand il tente de l’embrasser une ultime fois, ce qui l’oblige à s’en défaire.

    Cette capacité de compassion pour autrui, même pour l’ennemi, c’est ce qui caractérise l’hellenisme. Hector et un barbare, car il ne parle pas grec, mais Homère le montre sensible et humain. A l’inverse Agamemnon, le chef des Grecs est montré comme borné, brutal et autoritaire. C’est Achille qui lui dira ses 4 vérités : Sa guerre est inutile et stupide. Il aurait dût chercher â s’entendre avec les Troyens.

    C’est avec l’Iliade qu’Aristote a fait la formation d’Alexandre.

    Aussitôt Darius battu, Alexandre demande a ses généraux de se marrier avec les princesses locales et de respecter leurs coutumes.

    Cela met le Judaïsme devant une contradiction : Alexandre l’epargne et le respecte, mais les Juifs commence à s’hellèniser ( comme les Egyptiens et le proche orient)

    A Alexandrie d’egypte il fait construire un quartier juif et son successeur Ptolémé fera entrer la Thora dans la bibliothèque.

    Cela ne plait pas aux Juifs conservateurs pour qui l’universalisme de ces Grecs curieux de tout fait sauter en éclat le concept de peuple élu.

    La réponse de Dieu sera Jésus et plus particulièrement ce qui se passe lors de la dernière paque. (Jean 12:20)

    Quelques Grecs demandent à voir Jésus. quand Philippe et André l’annonce au Christ il répond :

    Elle est venue, l’heure où le Fils de l’Homme doit être glorifié!

    Mince alors! quel est le rapport?

    Le christ l’explique par la parabole : Si la graine ne tombe en terre et ne meure pour renaitre il n’y aura pas de fruits.

    Les Grecs en question, c’est la terre que le Seigneur attendait. Non pas qu’ils soint un nouveau peuple élu, mais la pensée universaliste et philanthrope grecque permettait au Verbe de Dieu d’atteindre les nations.

    Les Grecs, nous dit l’Evangile, sont l’olivier sauvage greffé sur le tronc de l’olivier franc. Et que de ce fait ils ne doivent pas se glorifier au dépends des Juifs cas c’est le tronc qui porte la branche et non l’inverse.

    Je souhaite à mes frères Juifs d’aller dans la paix du christ.

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